Temoe, sur la route de Pitcairn

Sur la route de Pitcairn, l’atoll Temoe est à une trentaine de miles de Mangareva dans les Gambier.
Pas de passe, Temoe est un petit atoll de 6 km de long avec quelques motus. Les Mangaréviens vous diront que l’on y envoyait les indésirables et que leurs ancêtres considéraient l’atoll comme une sorte de « garde-manger »…
Lorsque les premiers missionnaires arrivèrent, tous les habitants de Temoe furent rapatriés aux Gambier, et rien ne fut détruit de sorte qu’aujourd’hui il y subsiste des vestiges d’habitation et un beau marae.
Temoe, aujourd’hui inhabité et inexploité (le transport du coprah couterait trop cher) constitue un refuge pour les oiseaux et ses eaux vantées très poissonneuses aussi bien à l’intérieur du lagon qu’à l’extérieur.
La météo des prochains jours annonce du Nord, des conditions idéales pour Temoe, nous lançons une expédition sur CAT’LEYA avec plusieurs voileux de bateaux copains de Taravai et un couple de polynésiens qui connaissent le coin. La pêche à la langouste est encore autorisée en cette saison, et de plus sur le trajet aller-retour les lignes de traîne devraient siffler…
Départ de Taravai au lever du jour, le vent du Nord est bien là, faible mais plein travers, CAT’LEYA file à 7 kts. Les traînes sont mises à l’eau. Quelques minutes plus tard de jeunes fous de plus en plus nombreux viennent tourner autour des leurres, l « ’exciteur » de Jean les intéressent particulièrement… Et bien entendu, le plus téméraire finit par se jeter sur un leurre…. Séance SAMU à bord il faut décrocher l’hameçon du fou… En fait les fous adultes n’apprennent pas à pêcher aux petits, de nombreux jeunes oiseaux meurent de faim, d’où leur voracité à se jeter sur les leurres de pêche…
Puis nous auront la séquence « poids lourd » avec une touche sur un gros marlin, nous enroulons le génois pour ralentir le bateau, 700 m de bobine dévidé… le moulinet Penn qui s’affole et hurle par à coups… et le fil en dyneema qui finit par rendre les armes et casser…
Nous nous en sortirons tout de même avec un petit thon.


Après quelques heures de navigation Temoe est en vue, la houle de Sud-Ouest nous invite à trouver un mouillage sur le côte Nord-Est. Après une rapide exploration de la côte nous mouillons par 20 m près du platier, la mer est calme, le vent faible, tous les feux sont au vert pour passer une nuit confortable !

Avant cela, reconnaissance à terre, la marée est haute, il faut quand même passer les vagues qui cassent à l’entrée du platier et atterrir… Notre ami de Taravai observe les vagues et me donne le top, gaz pour rester juste derrière le sommet d’une vague qui va nous « porter » sur le platier… Je me demande bien comment nous allons faire dans l’autre sens…

Sur le motu, au Nord-est vestiges d’un marae de belle taille, de l’autre coté accès, au lagon intérieur. Sur le motu, seules les traces des bernard l’hermite dessinent des arabesques sur le sable.

C’est l’heure de rentrer à bord pour se préparer pour la pêche de la nuit… Nous trouvons un trou dans le platier avec plus d’eau et poussons l’annexe à quelques mètres du tombant, gaz et c’est parti nous sommes dehors…

Ce soir, c’est la nouvelle lune, nous sortons à marée descendante par la petite « passe » que nous avions repérée, le niveau de l’eau a déjà bien baissé sur le platier. Nous faisons 2 groupes et partons en sens inverse sur le motu pour être sur le platier à la bonne heure armés de nos lampes-torche.
C’est une première pour moi, il me faudra un peu de temps pour repérer les petits reflets rouges qu’émettent les yeux des langoustes et plus encore pour être suffisamment rapide et attraper ces petites bêtes qui s’avèrent fort rapide dans leur déplacement… Finalement l’expédition est un succès avec en plus des crabes toï toï et point point.
Reste à ramener le fruit de notre pêche à bord… La marée est basse, il faut traîner l’annexe et utiliser les vagues pour gagner mètre par mètre le bord du platier… Mais là c’est coton, les vagues, pourtant de petite taille déferlent et s’avèrent fort puissante face à notre annexe qui fait pourtant son 3 mètre 80… pas question de descendre le hors-bord, il n’y a pas d’eau… Il faut avancer, positionner le dinghy dans le trou que nous avions repéré, le maintenir face aux vagues, écoper puis recommencer, quelqu’un tombe dans le trou et s’agrippe à l’annexe, plus de peur que de mal, au nouveau signal, gaz… ça y est nous sommes en eau profonde… A posteriori, c’était vraiment « chaud »… mais l’expérience en valait la peine, première pêche à la langouste de nuit et un beau butin à l’arrivée !

Le lendemain, nous décidons de rentrer via le banc Portland et d’aller y faire une plongée bouteille… Les fonds ne seront pas très intéressants, probablement que la houle de Sud balaie toute vie coralienne qui tente de s’y installer et c’est surtout du sable que nous y verrons.
A 22h30, nous rentrons aux Gambier par la passe Sud-Ouest suivant scrupuleusement la trace du matin jusqu’au mouillage de Taravai. Belles journées !