16 novembre 2016 12h30 : 15′ avant le départ, nous finissons juste d’installer la pièce de fixation du bout dehors à la poutre avant… Il reste encore quelques lattes à remplacer…
12H40 : c’est bon, nous larguons les amarres, il nous reste 5′ pour hisser les voiles et rejoindre la ligne de départ au moteur; nous passons donc la ligne en bon dernier cette fois sous GV et Génois. Pendant que nous préparons le spi, nous choisissons une route plus lofée, dans le couloir inter-îles (entre Sao Vicente et San Anton), de manière à faire de la vitesse.
Une fois le spi asymétrique en place, nous abattons en prenant bien soin de laisser San Anton à notre tribord et suffisamment loin pour ne pas subir son dévent.
L’effet Venturi qui devrait s’étendre sur 50 miles au Sud-Ouest ne fonctionne pas, CAT’LEYA tire des bords nous croisons et recroisons la flotte… et ça marche !
Petit à petit nous reprenons les autres concurrents mais notre stratégie est de partir dans le Nord, il nous suffit d’attendre d’être suffisamment loin de San Anton…
J’ai bien étudié la météo, et une onde tropicale d’Ouest se présente… très petits airs en prévision sur la route orthodromique que pourtant tout le monde va suivre sauf 3 bateaux, CATLEYA, SHAMAL et MARIELA. J’apprendrai plus tard qu’ils sont routés par un routeur « professionnel ».
Et il faut aller vite car la dépression va ensuite partir vers le Nord et il nous faut profiter du vent qu’elle amène avec elle (sens inverse des aiguilles d’une montre au Nord de la dépression donc bon pour nous pour faire de l’Ouest !)
Les jours qui vont suivre sont durs pour le moral nous dégringolons jusqu’à la 55ème place !
Mais je rassure l’équipage, ça va payer !
Derrière SHAMAL et MARIELA on « jeté l’éponge » ils sont partis vers l’Ouest ce qui pour moi est à ce moment la pire des stratégies. Effectivement à l’arrivée, ils auront fait beaucoup de moteur…
Le routage du 23 Novembre avec les gribs montre bien la dépression ainsi que les conditions plus que faibles qui sévissent sur la route directe…
Nous continuerons ainsi notre montée jusqu’à la latitude des Bahamas, tandis qu’à terre tout le monde pense que le skipper à pété un câble !
J’enverrai même un mail à l’ARC : « Nous venons de croiser des baleines, des pingouins, des lions de mer… Portons nos combinaisons arctiques… Finalement nous partons sur Cheasapeake Bay ! »
et recevrons en réponse : « Attention aux icebergs… »
Nous avons du vent, la mer est belle et CATLEYA file bien plus vite que tout ceux « d’en bas »… Le moral est au beau fixe, nous remontons inéluctablement dans le classement et avons une pensée émue pour les heures moteurs évitées…
Nous nous surprenons à penser à une arrivée dans les 10 premiers, mais je tempère notre optimisme car, depuis le départ, je sais que l’arrivée sera compliquée par une dépression qui va traverser l’Atlantique….
Les nuits c’est le festival des grains, éclairs, pluie battante, saute de vent… Il faut gérer, on se détourne, on affale, on fait du moteur en fuite, etc.. Heureusement qu’il y a le radar pour repérer et suivre les déplacements des grains.
Un soir nous apercevons RAMBLER 88 à l’AIS, à quelques 20m miles de notre position, notre stratégie était donc bonne ! Il battra finalement le record de l’ARC !
Nous attaquons la descente plus difficilement et tout à coup plus de GV, la drisse s’est cassée !
Il faut monter au mât (27mètres au-dessus du niveau de la mer) en plein Atlantique et qui s’y colle ? Moi bien sûr, moteur et CATLEYA file vent arrière pour minimiser les mouvements de roulis et de tangage. Il nous faudra quelques heures pour repasser une nouvelle drisse et repartir…
Mais ce n’est pas fini, le lendemain de nouveau GV en bas, cette fois c’est la sangle de têtière qui s’est décousue (décidément, notre maître-voilier a des problèmes avec le coutures ! ) fixation de fortune il faut que ça tienne… et ça tiendra !
Les 2 derniers jours nous serons au près…
Finalement nous arriverons le 30 à 9h03 locales soit 13 jours après notre départ de Mindelo, 4ème de la flotte, avec peu d’heures de moteur par rapport aux déclarations des concurrents honnêtes.
Et oui, il faut savoir qu’une heure moteur coûte 1,8 heure mais que le nombre d’heures est purement déclaratif.. Comme chaque année les tricheurs sont nombreux… et leurs motivations parfois peu claires… Ainsi le premier arrivé déclare 5 heures et en réalité a fait du moteur pendant 11 jours sur l’orthodromie (dixit les 2 membres d’équipage très remontés de leur expérience de motor-sailing). La skipper est un ancien propriétaire de bateau moteur, il sait faire. (Lors de notre première rencontre à Madère, ils nous confiait ne pas savoir utiliser un spi. Pour leur premier test, ils avaient tout simplement mis les écoutes et envoyé… sans les bras. L’affalage rendu nécessaire immédiatement a été compliqué vous imaginez…) Comment est-ce possible? Un Lagoon 450 emporte 1000 l de gas-oil, celui-ci avait plus de 500 l en jerricans, il utilisait un seul moteur, consommation estimée à bas régime 3.5l, cela laisse de la marge pour le groupe électrogène… Et cela suffit pour créer un vent apparent qui permet de naviguer avec un code 0 au largue ! Tout ça pour se venger de l’ARC d’une quatrième place dans le leg 1 car le premier aurait fait plus d’heures moteur que déclarées. A sa décharge cela fait des années que les classements sont « pourris » par les tricheurs au moteur et rien ne change au niveau de l’ARC ! Et pourtant là c’est évident, le bateau a suivi rigoureusement l’orthodromie, il suffit de comparer sa vitesse avec les bateaux voisins pour se rendre compte de la supercherie… qui plus est au code0 alors qu’il possède un Parasailor…
Quant à la pêche, elle ne fut pas « miraculeuse », 12 touches dont un espadon remonté à quelques centimètres du bateau, qu’un coup de queue opportun aura vite remis à flot… Et 2 prises, 2 barracudas dont un beau spécimen, auront tout de même agrémenté notre quotidien fort gouteux.
Nous avons testé de nombreuses configurations de voile rendues possibles grâce aux 2 tangons et aux 3 fixations installées sur CATLEYA.
Ainsi se termine notre ARC+ 2016 !
Vous pouvez être fiers. La bise fréro.